L’Aurar est une drôle de structure associative, à but supposément non lucratif, mais riche comme Crésus, ainsi que l’a révélé Jacques Tillier ; il est vrai que 22 millions d’euros de trésorerie, ça ne court pas les rues à La Réunion, avec un chiffre d’affaires du double, le tout dirigé par une seule personne, Marie-Rose Won Fah Hin, ex-Gras pour être précis. La dame de l’Aurar fait en interne l’objet d’un véritable culte de la personnalité, écho d’un pouvoir réel sur tout ce qui bouge, respire et pense au sein de l’Aurar. Pense… enfin surtout ce qu’il est permis de penser, à partir de ce qu’il est permis de savoir. Pas de contestation au sein de la maison Aurar, ce n’est pas bien vu, mieux vaut se conformer, mettre les oreilles en arrière et applaudir chaque apparition de la Directrice générale dans les médias, à l’occasion des actions ostentatoirement caritatives, de l’obtention de prix aussi prestigieux à l’international que le "fameux" Tekoma Award - le Tecoma est un pied d’bois rodriguais - qui récompense les chefs d’entreprise du Landerneau, dont Marie-Rose Won Fah Hin, quand bien même l’Aurar n’est pas vraiment une entreprise, du fait de son statut associatif, de l’exemption des charges et impôts qui découle dudit statut et de la source intarissable d’une clientèle captive.
La machine Aurar produit tant et si bien que le directrice générale a tenté de la privatiser en 2007, au profit d’actionnaires privilégiés, en incitant même le personnel à s’impliquer en urgence… Le coup a fait long feu, l’Autorité régionale de santé ayant bloqué in extremis cette très profitable métamorphose et mettant un terme provisoire aux rêveries à la Pérette, celle du pot au lait évidemment. L’affaire a fait du bruit, mais Marie-Rose Won Fah Hin qui a de l’entregent et un sociogramme construit comme une partie de blitzkrieg, a survécu à la crise grâce la complicité passive de personnes de qualité et une indifférence judiciaire remarquable.
Depuis l’Aurar a changé de braquet et misé sur la diversification du bouquet d’affaires. Pourquoi bouquet ? Parce que Marie-Rose Won Fah Hin est romantique, elle aime à signer ses créations d’intitulés qui renvoient à la partie florale de son prénom, un peu comme la première déclinaison de Rosa, en latin. Ainsi, la boutique (SCI) qui porte les différents ensembles immobiliers gérés par l’association Aurar se nomme "Rose des sables", quand une autre s’intitule "Adenium Investment" ; "adenium" étant le nom savant de la rose du désert, appelée encore faux baobab… Et puisqu’on est dans les fleurs, pourquoi ne pas citer cette autre SCI, dénommée Le Longose… à savoir Hedychium gardnerianum reconnue comme l’une des pires espèces envahissantes au monde par l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature. Brrr !!! Trève de digressions florales, pour peu que l’on cherche à effeuiller l’Aurar, comme le poète de l’Ode à Cassandre, on s’attire rapidement des manifestations spontanées de salariés et syndiqués maison CGTR et CFTC qui, sans que leur directrice générale adorée en soit informée (sic), déboulent vous intimer de cesser ce trouble à l’ordre public supposément suscité par la CFDT… Car il règne dans cette maison comme un air de guéguerre syndicale dans laquelle nous n’entrerons point.
Cet aréopage issu directement du comité d’entreprise de l’Aurar était fort échauffé, du fait de soupçons de "vengeance personnelle" et syndicale, suite à la mise en œuvre d’une procédure de licenciement, en juin 2017, de la représentante CFDT, trésorière du comité d’entreprise par ailleurs responsable comptable et financière de l’Aurar. Procédure qui aurait abouti le 23 août dernier, selon les membres du CE de l’Aurar qui ont poussé la générosité jusqu’à nous l’écrire…
Fait plaisant, ces braves gens, il n’est pas permis d’en douter, quand bien même l’un d’entre eux, membre du comité de direction, un peu plus excité que les autres, a dû être calmé manu militari, du fait d’un évident manque de tact et d’instinct de conservation, nous ont appris des choses, et en ont appris aussi. Quid de la domiciliation du siège social d’Adenium au 10 rue du Bois le Vent, Paris XVIe ? Les 22 millions d’euros de liquidités au sein de la boutique les ont surpris aussi, d’autant qu’ils n’ont pas de 13ème mois et que leurs primes ne sont apparemment pas à la hauteur du magot de l’Aurar… Idem pour la prime de la directrice générale… Globalement, même si l’ambassade Aurar, du moins les six membres reçus, qui ont obligeamment énoncé leurs noms et qualités chez FreeDom à la sortie du JIR - signe que leur démarche était furieusement spontanée - nous ont dit qu’il fallait arrêter d’écrire sur Mme la directrice parce que cela lui faisait de la peine et que cela risquait de la déstabiliser, auquel cas l’État pourrait nommer quelqu’un d’autre… nous avons bien compris qu’ils faisaient leur travail avec conscience professionnelle et au mieux. Il n’a jamais été question d’en douter ; les seules questions qui se posent sur l’Aurar concernent sa haute hiérarchie et la politique associative impériale de madame la directrice générale. Nombre des salariés commis par Mme Won Fah Hin pour nous intimer l’ordre de regarder ailleurs que dans les affaires de l’Aurar ont montré qu’ils ne savaient que ce que la direction voulait bien leur dire, qu’ils vouaient un respect absolu à la personne de son infaillible directrice générale et qu’un climat de défiance généralisé régnait dans la boutique. Ainsi la remise en cause du respect par l’Aurar de son objet initial ne pouvait selon eux procéder que d’un complot, le nom de Clinifutur a été cité, en sus de celui de la CFDT. Pourquoi pas les Illuminati ? Quid du contenu de la plainte déposée un temps par un délégué CFDT puis retirée providentiellement… On ne veut pas le savoir. Toute velléité en ce sens serait sans doute dûment sanctionnée. De même pour les problèmes de harcèlement sexuel qui ont à plusieurs reprises émaillé l’histoire interne de l’Aurar sans émouvoir grand monde… Ces sujets ne sont pas bienvenus. De même que le mélange des genres entre Aurar et ambitions politiques de Madame Marie-Rose. Tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes dialysés… On s’interroge quand même un brin sur le pourquoi d’une fondation, Philancia, qui drague les dons des entreprises, quand le seul magot de l’Aurar suffirait à financer bien des travaux de recherche, ou à améliorer directement la qualité de vie de nombre de patients dialysés et impécunieux. Car enfin, si l’Aurar thésaurise à ce point, c’est bien grâce à ces pauvres gens, et ce serait un juste retour des choses que de leur rendre une partie du magot de Madame Marie-Rose.
Affaire à suivre… D’autant que Cassandre n’a jamais rien annoncé de bon, d’où le complexe éponyme.
Philippe Leclaire - Le Journal de l’île / p.3
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