dimanche 28 mai 2023

Ainsi va la démocratie

Hier la commission permanente de la Région, qui n’est pas une officine occulte mais l’un des rouages du fonctionnement démocratique de la collectivité, constitué d’élus régionaux au prorata de leur représentativité électorale, a validé l’attribution au JIR, au titre du régime des aides au sauvetage et à la restructuration pour les PME en difficulté, d’une subvention de 2 millions d’euros, pour permettre à la société SAS Journal de l’Île de La Réunion (le JIR) d’investir et de se digitaliser.

"Le soutien apporté au JIR et à ses salariés, 200 emplois directs et indirects, autant de familles réunionnaises, n’est en rien un "cadeau" ni un privilège aristocratique."

Pour être nécessairement et au sens propre du terme "exceptionnelle", à savoir non renouvelable, ce type d’aide n’est en rien extraordinaire, ni à La Réunion - où le groupe Quotidien a déposé une lettre d’intention pour accéder au même type d’aide à la même hauteur et finalise actuellement le bouclage de son dossier - ni au niveau national, loin de là. Pour mémoire, sur la base des chiffres rendus publics pour 2016, 200 titres de presse écrite ont reçu des subventions de l’Etat, dont Aujourd’hui en France 7,7 millions d’euros, Libération 6,4 millions d’euros, Le Figaro 6,4 millions d’euros, Le Monde 5,4 millions d’euros, La Croix 4,4 millions d’euros, L’Humanité 3,5 millions d’euros… autant d’aides qui ne sont en rien exceptionnelles contrairement à celle qui a été attribuée au Journal de l’Ile, et fort régulièrement renouvelées, d’années en année, à hauteur de 400 millions d’euros en moyenne. La presse est un secteur d’activité en crise par les temps qui courent, nul ne l’ignore, et il est logique que la collectivité lui vienne en aide comme elle le fait, de même que l’Etat, à peu près dans tous les domaines de l’économie réunionnaise de l’agriculture au BTP en passant par le tourisme, la création artistique, les transports… Le compte-rendu de la commission permanente précise : "Le JIR avait sollicité la Collectivité et l’État dès septembre 2016 pour négocier un plan de sortie de crise. C’est ainsi que conjointement l’État, d’une part, et la Région, d’autre part, ont défini les modalités d’accompagnement pour permettre de préserver la presse écrite régionale et les emplois, et de développer une nouvelle stratégie d’investissement en matière numérique…" Il convient de préciser que l’aide régionale a par ailleurs conditionné l’intervention de l’Etat.
Le soutien apporté au JIR et à ses salariés, 200 emplois directs et indirects, autant de familles réunionnaises, n’est en rien un "cadeau" ni un privilège aristocratique. Il s’inscrit, au-delà d’un strict caractère financier et économique dans la nécessité exprimée par l’Etat et les collectivités, tant à La Réunion qu’en métropole, de préserver la pluralité de la presse, condition nécessaire à un bon fonctionnement démocratique.
La chose n’est pas franchement nouvelle, sauf pour les folliculaires qui font profession d’ignares patentés plus attachés à la vertu des canidés qu’aux vertus citoyennes. Les aides à la presse sont même consubstantielles à la démocratie, nées en 1796 en pleine Révolution française elle se sont perpétuées jusqu’à nos jours où elles concourent au soutien à la diffusion et au pluralisme.

Car la presse a ceci de particulier qu’elle véhicule des idées et garantit la liberté d’expression, de par sa pluralité même. Il est d’ailleurs significatif de noter que ceux des politiques qui s’opposent à l’aide attribuée démocratiquement au JIR sont précisément les plus populistes et démagogues de La Réunion, à commencer par les représentants du LPA de Thierry Robert, pour lequel la désinformation et la crétinisation des électeurs constituent un outil de pouvoir. Il n’est pas anodin de voir ce triste sire, en délicatesse avec la justice et même ses clients, user des réseaux sociaux à grand renfort de publications "sponsorisées" et donc artificiellement gonflées moyennant finances, sur Facebook, par exemple, parce que ces espaces de libre communication traitent à l’identique le vrai et le vraisemblable, la fiction et la réalité, le mensonge et la vérité. Une presse libre et plurielle constitue une abomination pour ceux qui vivent de faux semblants et d’escroqueries intellectuelles, et les nervis de Thierry Robert, en sa présence, n’ont pas hésité à frapper une journaliste du JIR et un confrère du Quotidien qui cherchait à la protéger en septembre 2012…
Alors évidemment, depuis peu, Thierry Robert a rasé sa moustache pour expliquer au bon peuple qu’il avait changé, fait symboliquement acte de contrition…

Cela n’empêchera pas le JIR de lui signifier ses quatre vérités, ainsi qu’à ses affidés, complices et porte-plume chaque fois et aussi longtemps que nécessaire, sur papier et en ligne. Ainsi va la démocratie.

Philippe Leclaire - Le Journal de l’île / p.3