dimanche 26 mars 2023 ![]() |
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L’odeur de la campagne | |||
Comme s’il avait déjà quitté l’Élysée pour la Corrèze ou ailleurs, François Hollande envoie une carte postale. Lui qui était resté silencieux jusque-là sur la campagne vient d’accorder une interview au Point pour alerter les Français du risque d’un duel Le Pen-Mélenchon au second tour. Il ne le dit évidemment pas explicitement mais le chef de l’État considère que l’élimination d’Emmanuel Macron au premier tour au profit de Jean-Luc Mélenchon constituerait un péril pour la France. Dans sa carte postale, il conseille aux Français de lire deux fois les programmes proposés plutôt que se laisser divertir par « le spectacle du tribun ». À droite comme à gauche, les électeurs sont effectivement déboussolés. Par les conséquences des primaires, par le poids des affaires. On pourrait rétorquer aussi à François Hollande qu’il n’est pas étranger à cette situation. Parce que 7 Français sur 10 jugent que son bilan n’est pas bon. Parce que les classes moyennes paient proportionnellement plus d’impôts en France que dans d’autres pays européens. Parce que les précaires ne croient plus à la gauche mais au FN pour les sortir de leurs conditions. Parce que son virage social-libéral a heurté une part de sa majorité. Parce que le thème de l’immigration reste toujours le carburant de l’extrême-droite. Parce qu’il n’a pas su, non plus, faire croire au projet européen. Alors, oui, l’odeur de la campagne est détestable. L’indécision mais surtout la versatilité des opinions rendent imprévisible la météo de la soirée 23 avril. Ce qui inquiète est que le résultat du scrutin soit avant tout celui d’un vote de colère, de rejet, d’indignation. L’adhésion à un projet commun n’a jamais atteint des seuils aussi bas. Les cinq prochaines années risquent donc d’être très longues et tumultueuses. Avec une future majorité peut-être introuvable. Cette défiance vis-à-vis des responsables politiques fait peser de sacrés craintes pour notre démocratie. Mais toute une partie de l’électorat ne semble plus pouvoir l’entendre. Philippe Le Claire - Le Journal de l’île / p.3 |